Une royauté perdue...
que reste-t-il du sujet fort que nous avons tant célébré ?
Nous pensons, nous vivons, nous nous ressentons comme des petits rois
dans les domaines de nos vies et nous croyons nous promener dans le
quotidien comme le roi-soleil à Versailles, gratifiant les uns, désapprouvant les autres,
prenant mille décisions sur le champ de notre vie: il nous faudrait si peu
pour nous exclamer comme Cinna ou comme quelque héros cornélien :
" Je suis maître de moi comme de l'univers ."
( il est des positions physiques où il est assez facile de prononcer cet
alexandrin, par exemple, au 7ème étage d'un immeuble, avec une vue large
sur les Vosges et la Forêt Noire, avec la flèche de la cathédrale de Strasbourg
dans l'axe du salon... )
Et puis, nous avons appris à la bienheureuse école de si belles conjugaisons !
Elles ont toutes un point commun, chaque temps commence par la première
personne " JE ", et il faudrait une trépanation crânienne pour nous déloger de
notre conviction qui émane tout droit d'une convention d'un grammairien médiéval
qui décida," pour les siècles des siècles " que nous dirions JE comme au dit
au chien : " Attaque ! ".
La plupart du temps, nous passons notre vie à maintenir cette illusion d'un sujet
fort, conforté par les écoles, et par cette habitude de nous percevoir à travers
notre position la plus élogieuse et flatteuse, notre travail, la petite surface
que nous occupons, qui représente souvent notre secteur le plus sûr,
celui d'une compétence reconnue.
Dès que nous sortons de notre bulle professionnelle, - à moins d'exercer
la profession de dictateur ou de tyran -, nous devenons un sujet faible,
car ce qui commande notre attitude, nos pensées, nos actions, ce n'est plus notre fier
mental, ce sont les toutes puissantes ambiances qui nous dominent.
Il n'y a plus rien à discuter, l'ambiance assure, l'ambuiance rassure, l'ambiance
est une passion hypnotique qui fait de moi un sujet-poussin face à un magicien
automate. La modernité à succès, la modernité des écrans, des pubs et des affaires
a magnifiquement intégré ce principe : pour faire un client-roi, il suffit
d'un sujet mort. Il n'y a vraiment plus rien à discuter !
( Comme disait quelque part P. Sloterdijk, les images sont beaucoup plus animées
que ceux qui les regardent.... . )
On pourrait croire que celui qui écrit est sorti d'un bar à Pigalle en se faisant plumer de
1000 euros en quinze minutes, ou qu'il est demeuré trop longtemps dans les rayons
s'un supermarché, non, nous pouvons l'avouer, c'est dans une église, pendant
un office religieux, que nous nous sommes dit : vraiment, Seigneur, il serait très
difficile maintenant de sortir d'ici !
Quand les ambiances sont reines, il est bien difficilede rester roi... .
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