GAGNER DE L'ARGENT, PAS SEULEMENT !

 


Cette semaine, en France, nous apprîmes bien plus des feuilles mortes
que des feuilles de nos journaux; nous pourrions même dire que seules
sont mortes les feuilles de nos journaux et que seules vivent les feuilles 
dites mortes.... 

Nous publions avec plaisir ce petit extrait du langage des feuilles de Bruno Frappat :

" Regardons-les un peu, ces feuilles dites - mortes -, avant leur ramassage.
Mortes ? C'est une calomnie ! Ce n'est pas parce qu'elles ont changé
de couleur qu'elles ont cessé de vivre. Ce n'est pas parce qu'elles sont tombées
de leur arbre qu'elles ont renoncé à toute vie intérieure. Ou cessé de s'adresser
à nous, dans leur langage. On parle bien du " langage des fleurs ", pourquoi
pas le langage des feuilles ? 

Voyez les feuilles jaunes comme mille soleils qui courent encore sur le bitume
au premier coup de vent. Voyez comme ces annonciatrices des printemps à venir
se réjouissent ( à tort ) de nos regards. Voyez virevolter ces autres plus petites,
comme des ailes de papillon blanc. Elles ont l'air toutes joyeuses et semblent se
dire qu'elles agrémentent bien le bitume noirci de nos rues et de nos trottoirs.
Et que cela doit nous faire plaisir. Voyez ces tapis de feuilles encore vertes se regrouper
au pied des arbres ou dans les caniveaux, bien vivaces, persuadés de leur perpétuité.
Le moindre rayon les fait luire. Quel bel optimisme !

                                                        ... / ... 

  Ecoutons les messages des feuilles , pour quelque jours déposées devant nous
comme des témoins des belles saisons d'antan. Ecoutons leur optimisme foncier,
ces lumières qu'elles mettent sur le pavé comme pour nous dire que le soleil 
reviendra, que la succession des saisons est la seule certitude humaine, que l'attachement
des rameaux résiste à tout. Regardons-les se mouvoir en bandes organisées, en foules battant le pavé. Là-haut, elles remuaient au vent, ici-bas, elles se meuvent sur de plus grands espaces, comme par une liberté retrouvée.



                               Journal "La Croix", L'humeur des jours La chronique de Bruno Frappat
                                          édition du samedi 24 et du dimanche 25 novembre 2012